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Inès – La curiosité est une saine qualité

Inès Seri, journaliste Lyon

La curiosité est un vilain défaut. Et si c’était plutôt une grosse qualité ? Si c’étaient les questions que l’on se pose et les échanges que l’on provoque, qui nous faisaient grandir et nous ouvrir au monde ? Inès est journaliste (apprentie, mais plus pour longtemps). Mais c’est surtout une exploratrice. Une meuf qui s’écoute, qui a envie de suivre ses envies et ses passions, de découvrir le monde et de combattre l’injustice à sa manière. Même si le syndrome de l’imposteur n’est jamais loin derrière !

L’école de la curiosité 🕵️‍♀️

Du haut de ses 25 ans, Inès vient tout juste de terminer ses études. Enfin l’occasion de sortir du cadre scolaire, dans lequel elle ne s’est jamais vraiment sentie à sa place. « Pendant une longue période, à l’école, on m’a un peu cassée. Parce que je ne rentrais pas forcément dans les codes de l’école. Et en terminale, j’ai eu une révélation. »

Cette révélation, c’était le journalisme, qui l’intéressait depuis toute petite sans qu’elle ne s’en rende vraiment compte. Une passion venue notamment de son père, qui portait un grand intérêt à l’actualité et lui a donné goût à l’information. 

« J’ai toujours été hyper curieuse. Même parfois un peu trop. À vouloir tout comprendre, tout savoir. Et je le retrouve dans mon taf. […] Dis-toi que je viens de retrouver un journal que je faisais quand j’étais petite. J’interviewais mon petit frère, je jouais à la présentatrice… »

Aujourd’hui, ce n’est plus dans sa chambre qu’Inès joue à la journaliste, et ce n’est plus son frère qu’elle questionne. Après un bac S (par dépit), elle s’est orientée vers une licence d’info-comm’ et l’ISCPA, avant de multiplier les reportages chez Monkiiiz. Parfait pour continuer à poser ses questions, découvrir et transmettre des choses avec un maximum d’implication.

« Tu peux donner la parole à des gens qui n’ont pas l’occasion de faire passer leur message, et tu peux aussi montrer à des gens des choses qu’ils n’ont pas l’occasion de voir. Un prof me disait : “le journalisme, c’est un peu les yeux du monde.” »

En plus de pouvoir assouvir sa curiosité, c’est l’occasion pour elle de s’engager sur certains sujets, sans que ce soit forcément conscient. Car mine de rien, faire du journalisme, c’est choisir des sujets, des intervenants… Et donc, qu’on le veuille ou non, prendre position.

« Il y a une part de moi qui n’aime pas l’injustice. Et, à terme, j’aimerais faire passer des messages par rapport à ça. Je pense que c’est un peu ça, aussi, qui m’a donné envie. C’est un peu une manière de (je ne sais pas si c’est le bon mot) militer. […] Je suis hyper touchée par les causes sociales, humaines, et je trouve que le journalisme est un moyen de faire un peu justice, avec ce que tu produis. »

Réalité sociale et réseaux sociaux 📱

Pour choisir ses sujets, Inès est en veille en permanence. Un travail de longue haleine loin d’être évident à l’heure de la surinformation et des notifications qui pètent dans tous les sens. « Avec les réseaux sociaux, tu as un peu cette course au buzz, à la désinformation, au bad buzz et tout. Dans le traitement médiatique, j’ai un peu honte de faire cette profession parfois. Je comprends que des gens la détestent. »

Mais il y a un tas de journalistes qui font un travail de qualité, essentiel pour que l’on ait tous accès à l’information et qu’on puisse ouvrir les yeux sur le monde. Tout dépend où tu t’informes, et où tu fais le choix de t’informer.

Ce qui fascine Inès, c’est le photojournalisme et les reporters de guerre. Et, plus largement, le journalisme de terrain, qui permet d’aller voir la réalité en face et de montrer les choses telles qu’elles sont vraiment. « Je trouve que vraiment, ces gars-là, ils sont incroyables. Si ils ne sont pas là, tu n’es pas au courant de ce qu’il se passe dans le monde. Ils ne peuvent pas mentir et donner de la désinformation. »

Des réalités qui peuvent vite nous assaillir et impacter notre santé, surtout quand tout arrive en quelques secondes sur les applications. Parfois, on peut avoir besoin de couper pour préserver sa santé. Car entre les infos souvent négatives, le traitement médiatique injuste, la loi du kilomètre qui nous biaise… 

« Tu es tout le temps en sur-connexion, en fait. Ça a un impact sur la santé mentale. Il faut aussi penser à soi. Être tout le temps sur-informé, ça fatigue énormément. C’est paradoxal car quand tu fais ce métier, tu dois être connecté au monde… […] Ça me fait trop peur d’être addict à mort à mon téléphone. Les réseaux, c’est tellement cool, mais tellement dangereux… Sur la santé mentale, c’est terrible l’impact que ça a ! »

Se nourrir du monde 🌍

Dans tout ça, Inès tâche de se préserver avec passion. Ses yeux pétillent de la soif d’apprendre, de comprendre, de connaître. Le sujet qui n’a pas d’intérêt ? Connaît pas. « Je pense que c’est une des qualités premières qu’un journaliste doit avoir : tout est intéressant à faire, tout est cool à apprendre. Il faut juste être curieux de tout. Et tout est sujet à faire un sujet. Il faut juste savoir bien angler, trouver les bons interlocuteurs… »

Et ça, Inès sait le faire. Si elle aime tant le reportage, ce n’est pas pour rien. Elle aime échanger, voir les choses de près, les vivre, s’en imprégner pour en ressortir grandie et les retransmettre comme il se doit. « J’aime être sur le terrain, rencontrer des gens, parler aux gens. Être sur le vif du truc. Quand tu es sur le terrain, tu vis vraiment le truc. » Peu de doute, l’audiovisuel, qu’il s’agisse de photo, de podcast et / ou de vidéo, fera partie de son avenir. C’est ce qui lui permet de s’enrichir. 

« J’aime me nourrir du parcours d’autres personnes. Souvent, avec les interviews, c’est ça qui est cool : tu te nourris un peu de la vie des gens. […] Je vois des trucs qui n’ont rien à voir les uns avec les autres, et c’est ça, je trouve, qui fait la richesse des gens, et un peu l’ouverture d’esprit aussi. Tu vas voir ce que tu ne pensais pas aller voir au premier abord, et c’est là que tu deviens authentique et sincère dans tes projets. »

Ne croyez pas qu’elle fait un travail facile, qu’il s’agit simplement d’aller discuter avec des gens et de filmer. C’est un gros travail avant, pendant, après ! « Quand tu as un profil qui se questionne tout le temps, beaucoup, sur tout, que tout est sujet à des questions… Ton cerveau est tout le temps en ébullition, donc en fait tu ne te poses jamais. »

Transformer l’illégitimité en force 💪

« J’ai un gros souci de légitimité dans ma vie, donc je ne me sens pas légitime de dire quoi que ce soit. […] C’est handicapant, parce que tu te bloques à faire des trucs, tu te freines toi-même. Il y a toujours ce truc dans ma tête qui va me dire “redescends, meuf”. »

Ça fait partie des premiers mots que m’a dit Inès. Pourtant… Elle a une tonne de trucs à dire, elle fait des reportages de qualité et elle est pleine d’idées. Pas question de se démonter. « En vrai, si tu es passionné(e) et que tu en veux vraiment, tu finiras par trouver ta voie. Certes, tu peux galérer. Mais je n’ai pas de problème à aller bosser. Et s’il faut faire n’importe quel métier, ce n’est pas grave. Je ne vais pas rester là à rien faire. »

Même si elle a ce p*tain de syndrome de l’imposteur, on peut avoir l’impression qu’elle en a fait une force : elle prépare deux fois plus tous ses sujets, passe un temps fou à stalker pour tout comprendre et préparer les bonnes questions. « J’essaye de casser ce syndrome en me disant que je vais grave m’informer, comme ça j’aurais les outils pour bien rebondir et pas me trouver face au mur. » Et puis, peu importe les cases qu’on nous impose. Elle compte bien suivre sa passion et son cœur, et ne pas lâcher tant qu’elle peut avancer. 

« En fonction de ton âge, tu as des étapes à remplir et des cases à cocher. Alors qu’en soi, on s’en fout ! Juste vis, et trouve des trucs dans lesquels tu es heureux, tu vois. […] Je pense qu’il faut garder ce côté “passion”. Ma plus grande peur, c’est d’être enfermée dans une routine métro boulot dodo. Et t’es vide de l’intérieur, et y’a rien qui t’anime. […] Je veux trouver un truc où je me sens bien et où je suis en accord avec moi-même. »

Animée par beaucoup trop de trucs pour s’ennuyer, Inès est du genre à avoir tout le temps beaucoup de trop de choses à découvrir et à tester. C’est son moteur : « être curieuse sur le monde, et entourée de ses proches. Être bien entourée, aussi. C’est hyper important. Ouais, c’est ça qui m’anime, je pense. » Alors elle prend soin de sa santé mentale, et de sa santé sociale. En commençant par se ressourcer régulièrement près de ses racines, en Algérie.

« C’est hyper essentiel à ma santé mentale. C’est hyper important. Alors que ce n’est pas évident d’être binational : tu as peur de louper des trucs ici, mais là-bas aussi. Je pense que ta plus belle richesse, c’est vraiment ton entourage et là d’où tu viens. Et tant que tu arrives à te reconnecter avec ça, bah c’est ça qui te fait garder les pieds sur terre, je pense. »

En phase avec elle-même, avec son cœur et ses envies, Inès a beaucoup trop de choses à raconter, beaucoup trop de reportages à partager. Ce qui est sûr, c’est que tant qu’on lui donnera le micro et qu’on la laissera s’exprimer, tout ce qu’elle partagera sera vrai !